La rapidité et la facilité de publication des blogs permettent à de nombreux journalistes citoyens de contourner la censure. Selon Julien PAIN, de Reporters sans Frontières, les blogs ont « délié les langues des citoyens ordinaires » [1], ils sont devenus acteurs d’un journalisme « fait par le peuple et pour le peuple », pour reprendre le titre de l’ouvrage de Dan Gillmor [2]. Dans les pays où la censure [3] est forte et étendue, émane des blogueurs une information semble-t-il plus indépendante des gouvernements que celle des médias traditionnels.
Les blogueurs poursuivis pour non respect de la censure sont assez nombreux dans le Monde, d’après Reporters sans Frontières.
a. Un blogueur iranien
Arash Sigarchi [4] a été condamné à 14 ans de prison par le régime iranien pour avoir protesté sur son blog [5] contre l’arrestation de journalistes en Iran. Dans son blog, il rend compte de sa conception de l’indépendance de son pays « en publiant de vraies informations et en donnant (…) [sa] propre analyse des événements ». Pour lui, un blog permet « d’écrire librement », car on ne passe pas par d’autres médias pour la diffusion, on évite les commissions de censure. Pour lui les journaux en ligne sont « de petites agences de presse » ou « des instituts d’analyse ».
Il édite deux types de billets, des billets dans lesquels il s’exprime comme à l’oral, de façon informelle, et d’autres, qui sont de véritables articles, analyses, entretiens…
Il apprécie le retour critique des lecteurs via les commentaires et pense que « le journalisme via Internet peut contribuer à faire avancer la liberté d’expression ».
b. Un blogueur allemand
Markus Beckedahl [6] est cofondateur et président de l’ONG Netzwerk Neue Medien pour les droits numériques. Activiste, il trouve dans le blog un moyen de toucher plus de personnes, en comparaison d’une liste de diffusion restreinte aux personnes inscrites. En 2004 il commence un nouveau blog [7], il y fait circuler de l’information qu’il reçoit de par sa proximité de communautés politiques, diffuse toutes les nouvelles portant « sur les droits de l’Homme, le monde du logiciel libre, l’accès libre à la connaissance, la société de l’information et les droits d’auteur ».
c. Un blogueur bahreïni
Chan’ad Bahraini [8] (il s’agit d’un pseudonyme), habitant de Bahreïn, écrit dans l’anonymat. Il a choisi le blog [9] pour « pouvoir écrire sans restriction et être publié sans délai », mais aussi pour « susciter des discussions sur des sujets peu ou mal couverts » à Bahreïn.
Dans son blog, il discute des faits de l’actualité de Bahreïn, place des photos de manifestations auxquelles il a participé.
Il rencontre d’autres blogueurs comme lui, qui écrivent en anglais, dans des réunions réelles, régulièrement. Il tient d’ailleurs à souligner l’importance des lieux de discussion en ligne, tels que les forums.
Dernièrement, le recul du gouvernement qui avait arrêté trois modérateurs de forums, puis les a relâchés, lui semble dû à la rapidité de réaction et d’alerte de la communauté internationale, mobilisée par les blogueurs.
d. Un blogueur américain
Jay Rosen [10], journaliste américain et blogueur a créé son blog [11] Press Think en 2003. Allant a contrario des conseils reçus, il écrit de longs billets, des billets dans lesquels il peut dire librement tout ce qu’il pense, en s’affranchissant des contraintes de la norme qui veut qu’un billet de blog soit court. Il refuse de se soumettre aux lois du marché en fournissant au lecteur ce que celui-ci est sensé vouloir lire.
Dans son blog, il tente d’amener à la réflexion sur la presse et les médias d’information. Il revendique une « vraie liberté intellectuelle », loin des dictats du marché.
e. Une blogueuse chinoise de Hong Kong
Yan Sham-Shackleton [12] est une blogueuse de Hong Kong, régulièrement censurée par les autorités chinoises. Elle décide de créer son blog [13] pour tenir une promesse qu’elle s’était faite : rappeler « au monde les étudiants de la place Tiananmen », ses « héros ».
Ecrits, photos et dessins, cyberprotestations, entretiens, etc., toutes ses publications ont pour thème la libre expression. Son blog est un « éveil politique », pour tenir « une promesse faite aux morts ».
Les blogs permettent aujourd'hui la diffusion de séquences audiovisuelles, de grains d'information présentés au moyen de différents formats, et notamment de formats animés ou enrichis. Ils s'apparentent donc de très près, pour certains, à des plateformes de gestion de contenu.
Ces possibilités en matière de support de formats ne sont pas négligeables, l'on peut imaginer l'intérêt, pour un journaliste, à annoter un film de la même façon qu'une présentation projetée. Par exemple, un journaliste ayant couvert un événement, pourrait utiliser un démonstrateur ou un enrichisseur (selon les termes d'Adrien ferro) pour pointer des endroits à cadrer et grossir, pour signaler le nom de personnes ou édifices se trouvant sur le film. L'enrichissement du film, converti au format FLASH peut s'opérer tout simplement et rapidement en visionnant le film sur un ordinateur équipé des solutions logicielles adéquates. Ces outils logiciels permettent alors d'ajouter du sens à l'information.
Par ailleurs, le développement des technologies embarquées permet déjà d'alimenter un blog depuis un téléphone portable, voire depuis d'autres petits appareils mobiles (Ipod, Psion...). La technologie pourrait-elle être bientôt incluse sur certaines plateformes d'accueil de blogs ?
Isabelle Savin Tzvetkov, 28/02/2006.
NB Ce texte a fait l'objet d'une censure sur Relzone.com, au motif qu'il n'avait aucun rapport avec les thématiques que le site prétend traiter, il faut en conclure que Relzone ne traite nullement d'outils de diffusion rapide.
[1] Guide pratique du blogger et du cyberdissident, Reporters sans frontières, 14/09/2005, p. 5.
[2] http://bayosphere.com/blog/dangillmor
[3] Selon le dictionnaire linguistique Le Trésor de la langue française informatisé, la censure est l’action de « critiquer, de façon le plus souvent sévère, (...) la conduite ou les œuvres de quelqu'un », c’est un « blâme qu'un milieu social exerce sur ses membres quand ils ne se conforment pas aux règles morales ou aux valeurs admises dans le groupe (...) ».
http://atilf.atilf.fr/
[4] Guide pratique du blogger et du cyberdissident, Reporters sans frontières, 14/09/2005, « Iran – Un blog permet d’écrire librement », par Arash SIGARCHI, pp. 49-51.
[5] http://www.sigarchi.com/blog/
[6] Guide pratique du blogger et du cyberdissident, Reporters sans frontières, 14/09/2005, « Allemagne – Un moyen rapide et efficace de publier du contenu », par Markus Beckedahl, pp. 37-39.
[7] http://www.netzpolitik.org/
[8] Guide pratique du blogger et du cyberdissident, Reporters sans frontières, 14/09/2005, « Bahreïn – Le lieu de prédilection pour partager mes opinions et en discuter », par Chan’ad BAHRAINI, pp. 40-42.
[9] http://chanad.weblogs.us/
[10] Guide pratique du blogger et du cyberdissident, Reporters sans frontières, 14/09/2005, « Etats-Unis – Maintenant, je peux écrire ce que je pense », par Jay ROSEN, pp. 43-45.
[11] http://journalism.nyu.edu/pubzone/weblogs/pressthink
[12] Guide pratique du blogger et du cyberdissident, Reporters sans frontières, 14/09/2005, « Hong Kong – Glutter, une promesse tenue », par Yan Sham-Shackleton, pp. 47-48.
[13] http://glutter.typepad.com/
Isabelle Savin Tzvetkov, 28/02/2006.
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